[Grand Angle] De la fève au chocolat : Les dessous amers de l’industrie du cacao ivoirien

Du champ à la tablette, le chocolat fascine petits et grands, suscitant une tentation irrésistible à chaque carré croquant. Mais derrière cette douceur exquise se cachent des secrets bien gardés, des champs aux usines, où la magie opère. Cependant, au milieu de cette richesse chocolatière ivoirienne, persiste l’ombre de la précarité qui pèse sur les épaules des producteurs, témoins souvent oubliés de cette success story. Reportage.

Située dans la partie occidentale du golfe de Guinée, la République de Côte d’Ivoire est un pays dont la population est estimée à plus de 29 millions d’habitants. Véritable puissance économique émergente, le pays des éléphants s’est classé à la 17e place africaine des pays les plus riches en 2023, avec un Produit Intérieur Brut par habitant estimé à 7000 dollars. Ces résultats s’expliquent par les secteurs d’activité dynamiques, notamment le tertiaire qui représente 56% du PIB. Cependant, c’est le secteur primaire qui fait la fierté de la Côte d’Ivoire à l’échelle internationale, principalement grâce à la filière cacao. Avec une production annuelle de 2 millions de tonnes, la Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial de fèves de cacao, représentant 45% de la production mondiale. Le cacao constitue un pilier essentiel de l’économie ivoirienne, générant 40% des recettes d’exportation et contribuant entre 15 et 20% au PIB national. Cette filière emploie près de 600 000 planteurs et assure les moyens de subsistance de plus de 6 millions de personnes. À Abidjan, plus précisément dans la commune du Plateau, un établissement promeut les produits locaux sous le nom de la Boutique Paysanne. Initiée par la Chambre Nationale d’Agriculture de Côte d’Ivoire, cette entreprise vise à promouvoir et distribuer les produits agricoles ivoiriens issus de la transformation artisanale. « Officiellement, le projet est né en 2017 mais il a germé en 2016. On a remarqué qu’il y a avait beaucoup de pertes post-récolte donc, il fallait dans ce contexte là trouver la formule pour pallier ce problème : la transformation. Après la transformation, il fallait vendre. Donc, il fallait créer un espace d’exposition de ces produits afin de les commercialiser », renseigne Félicité Koffi, directrice de la boutique paysanne. Parmi les multiples offres de cette structure, le chocolat occupe une place privilégiée. Qu’il soit présenté en tablette, en poudre ou en fève recouverte de chocolat, cette substance alimentaire demeure la vedette de cette boutique.

De la pépinière à la cabosse

Pour mieux appréhender la fabrication de ce produit tant prisé à travers le monde, il faut se rendre dans les communes environnantes de la capitale économique, Abidjan. Notre premier arrêt nous conduit à Zeredougou, et plus précisément à Anoma Bokpli, un campement se trouvant à deux heures de route d’Abidjan. Conformément à la tradition locale, nous nous rendons dans la demeure du chef. Il s’agit ici de « donner les nouvelles » en déclinant son identité et l’objet de notre venue. Ce cérémonial fait, ils nous conduisent à la plantation de cacaoyers située à quelques pas du campement. Cette activité constitue la principale source de revenus de la bourgade. Sur les lieux, Silvain Yao Koffi, technicien agricole, procède à la plantation d’un cacaoyer préalablement conservé en pépinière pendant six mois.

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