Dans un post publié sur sa page Facebook, Thierno Bocoum, leader de AGIR, critique sévèrement le Premier ministre Ousmane Sonko pour ne pas avoir encore fait sa déclaration de patrimoine. Pour Thierno Bocoum, le PM doit dans un délai raisonnable faire sa déclaration de politique générale.
Texte in extenso :
Nous rappelons que jusqu’au moment où nous écrivons ces lignes le président de la République n’a pas encore fait sa déclaration de patrimoine conformément aux dispositions de la constitution en son article 37 dernier alinéa qui dispose : « Le Président de la République nouvellement élu fait une déclaration écrite de patrimoine déposée au Conseil constitutionnel qui la rend publique.»
Une violation flagrante de la constitution que rien ne justifie quand on fait du « juub, jubbal, jubanti » un slogan.
Nous avons assisté à une conférence de presse de députés proches du Premier ministre qui cherchent à nous faire croire que le règlement intérieur de l’Assemblée nationale ne permet pas d’accueillir ce dernier pour sa DPG. D’après eux, ce règlement qui ne prévoit pas une DPG serait falsifié.
Il est évident qu’il faudra prendre au sérieux cette affaire et situer les responsabilités, le cas échéant.
Cependant, quel lien avec la DPG ?
Les députés sont convoqués en plénière pour un débat d’orientation budgétaire ce samedi 29 juin 2024.
Ce débat est prévu dans quel article du règlement intérieur de l’Assemblée nationale ?
Aucun.
Le DOB a été juste évoqué, en passant, à l’article 41 bis en ces termes : « Les rapports issus de ces auditions servent à l’information des députés, notamment dans le cadre du Débat d’Orientation budgétaire (DOB) »
Ni le délai ni les modalités d’organisation n’ont été prévus dans le règlement intérieur de l’assemblée nationale. Le débat d’orientation budgétaire est prévue à l’article 56 de la loi organique relative aux lois de finances : « (…) ces documents sont publics et soumis à un débat d’orientation budgétaire à l’Assemblée nationale, au plus tard à la fin du deuxième trimestre de l’année. »
L’Assemblée nationale applique cette disposition de la loi sans l’inscrire dans son règlement intérieur.
Ainsi, vouloir nous faire croire que le fait que la DPG ne figure pas dans le règlement intérieur de l’Assemblée nationale est une raison pour ne pas recevoir le Premier ministre procède d’une méconnaissance. Cette exigence déjà prévue dans la constitution doit être appliquée.
En effet, l’Art 55 al1 dispose : « Après sa nomination, le Premier ministre fait sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale. Cette déclaration est suivie d’un débat qui peut, à la demande du Premier ministre, donner lieu à un vote de confiance. »
Cet article est inséré au titre IV intitulé « Du GOUVERNEMENT ». Il s’est agi de légiférer sur les prérogatives et obligations du Premier ministre et son gouvernement et non sur ceux de l’Assemblée nationale.
C’est le Premier ministre qui a l’obligation de faire sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale. Les dispositions constitutionnelles sur la DPG ont un caractère impératif et non facultatif. Le législateur peut fixer un délai comme ce fut le cas dans le règlement intérieur de 2019. Cela ne compromet en rien le caractère impératif et l’absence de délai ne rend pas non plus inopérant ce caractère édicté par les dispositions de la constitution.
Le silence d’un règlement intérieur ne peut pas freiner l’application des dispositions claires de la charte fondamentale. Encore que l’organisation des séances est déjà prévue dans le règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Les rôles du bureau et de la conférence des présidents sont clairement établis.
C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il a été possible d’organiser un débat d’orientation budgétaire sans que cela ne soit spécifiquement encadré par le règlement intérieur de l’Assemblée nationale.
Le Premier ministre doit dans un délai raisonnable faire sa déclaration de politique générale.
Il serait honteux qu’il cherche à s’agripper sur le silence d’un règlement intérieur qui avait naguère servi de base légale à ses partisans pour introduire une motion de censure contre l’un de ses prédécesseurs.
Thierno Bocoum
Ancien parlementaire
Président AGIR